30.05.2014 / Les Francomanias
Emilie Simon
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Les Francomaniaswww.francomanias.ch
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Depuis son premier album éponyme en 2003, Emilie Simon a fait un long voyage. De retour de New York, où elle avait le plus longuement posé ses bagages, elle retrouve la France avec un sixième album inspiré par l’effervescence romanesque d’un Paris sublimé. Une véritable Mue pour cette artiste singulière sur la carte pop française, qui rompt ainsi avec l’alchimie électronique ayant fait sa marque, au profit cette fois d’une approche sonore plus organique. La mise en retrait des machines est ainsi ce que l’on remarque en priorité à l’écoute de ces dix chansons où flamboient au premier plan un orchestre à corde, des cuivres et de multiples trouvailles acoustiques qui en accentuent le côté épique, romantique et, osons le mot, féminin. Pourtant, pour donner corps à cette odyssée sensuelle et majestueuse, Emilie a su s’entourer d’hommes, comme le jeune et ingénieux Français Tahiti Boy, le vétéran anglais Ian Caple (Bashung, Tindersticks) et enfin l’Américain David Kahne (Lana Del Rey, Strokes, Regina Spektor). Les cordes ont été enregistrées à Londres par Sally Herbert, incontournable tisseuse de songes à l’œuvre sur de nombreux albums pop anglais (Bat For Lashes, Pete Doherty). Quant aux cuivres, on les doit à un autre maître britannique du genre, Gary Barnacle (Costello, Clash, Bowie ou Pet Shop Boys). Mixé par Chris Cody (TV On The Radio), « Mue » s’annonce donc comme l’un des disques français les plus ambitieux de ces dernières années sans pourtant qu’Emilie s’en ressorte étouffée par un tel prestigieux entourage. Au contraire, son écriture déliée et imagée, ses compositions spacieuses et charmeuses, l’énergie scintillante de sa voix n’auront jamais autant été mises en valeur. D’emblée, elle pose le décor avec Paris j’ai pris perpète, déclaration d’amour sur un mode féerique à cette ville où furent écrits les textes de l’album.
L’euphorie quasi funky de Menteur et ses guitares très Chic agit ensuite comme un baume irradiant, les inflexions afro-cubaines de A l’encre de mon être rencontrent la magie des gamelans balinais dans un tourbillon à donner le vertige, avant l’apaisement d’une folk-song de clair de lune (The Eye of the moon) et le réveil en fanfare de Quand vient le jour. Une moitié d’album et déjà Emilie Simon a brouillé toutes les pistes où l’on pensait la trouver, presque méconnaissable et pourtant parfaitement elle-même, preuve que la Mue est réussie. Une ballade romanesque au piano (Les étoiles de Paris) avant que des trombes de cordes envahissent Des larmes, chanson hollywoodienne aussi profonde qu’une vallée, et l’album se poursuit dans le même élan, entre l’intimité des rêves de jeunes filles et leur transcription en cinémascope. Avec Le Diamant et Perdue dans tes bras, diptyque sous influence de l’Orient lointain, Emilie se mue en héroïne des films d’aventure et joue des modulations de son chant avec l’évident plaisir d’une comédienne capable d’endosser tous les rôles. C’est encore à cheval sur un piano qu’elle redescend doucement sur terre avec Les Amoureux de minuit, chanson-confession bouleversante et comme brûlée de l’intérieur par un orgue bluesy. Des carillons enchanteurs du départ à la mélancolie des lendemains d’extase qui nous prend en écharpe à la sortie, on se rend compte qu’Emilie Simon s’est transformée avec cet album en narratrice hors pair, jouant moins sur les ellipses d’écriture et les trucages sonores pour parvenir à bâtir son récit et lui offrir la plus somptueuse des enveloppes musicales. Avec son précédent album, Emilie Simon accomplissait la délicate prouesse de faire coïncider un travail de commande (la musique du film La Délicatesse) à travers des chansons parmi les plus intimes de son répertoire. Le cœur léger et des ailes retrouvées auront conduit naturellement Emilie à cette Mue spectaculaire. Plus mûre mais toujours mutine, ingénieuse et ingénue à la fois, elle a accompli une Mue dont il faudrait être de pierre pour ne pas ressortir ému.
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