28.01.2017 / Bourask
Broken Back
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De la trajectoire de Broken Back (alias Jérôme Fagnet), on pourrait tirer un scénario écrit à la façon d’un film de boxe. L’histoire d’un jeune homme engagé dans une voie professionnelle royale, puis qui physiquement s’effondre, trouve son salut dans la musique et, à travers elle, embrasse un large succès. Point de bascule de cet itinéraire rêvé : Broken Back, premier album éponyme où se content les coups du sort, la résilience et le bonheur recouvré.
En 2015 et la publication du EP Dear Misfortune, Mother of Joy, le Breton affolait déjà les compteurs. Elégant, efficace, enluminé, son art joué entre pop-alternative et deep-pop faisait alors aussitôt craquer les médias, s’emballer les festivals (Solidays, Francofolies...) et s’ouvrir parmi les scènes hexagonales les plus prisées (Trianon, Café de la Danse...). Résultat : les titres “Happiest Man on Earth” et “Halcyon Birds” fédéraient les fans et, jouissant d’un puissant effet viral, alignaient les vues par million sur la toile. On aurait imaginé pire destinée pour un artiste trois ans plus tôt rivé à son lit, le moral en berne et le dos démoli...
L’histoire est la suivante : celle d’un garçon doué et tête bien faite, qui se destine d’abord pleinement à l’entreprenariat. Et qui ne s’économise pas. Le jour, on le voit qui poursuit ses études au sein d’une grande école de commerce. Le soir, le même dirige de front ses start-ups. Et puis à vingt-deux ans le dos n’en peut soudain plus. Et lâche.
Bilan : va pour une convalescence prolongée.
Mais fixer le plafond : pas le genre de cet hyperactif. Alors Jérôme ressort d’un placard une vieille guitare en nylon. Ses classes au conservatoire sont loin, alors. Tout comme ces années passées à étudier le tuba, son premier instrument. Pour autant, la musique ne l’a jamais quitté. Alors il s’essaye à des covers (“Skinny Love” de Bon Iver), puis enregistre ses propres titres sur Logic. Broken Back naît là, héritier naturel de Chet Faker ou Hozier. Et enfant d’un drame personnel devenu seconde chance.
“Le malheur est le père du bonheur de demain”, aime à répéter l’intéressé, citant Albert Cohen. “L’idée est que dans toute expérience malheureuse, il y a une part de bonheur collatéral. Celle-ci sera plus ou moins importante si l’on embrasse cette conception ou pas.”
Une philosophie chez lui devenue moteur.
Page Soundcloud, profil Facebook, posts de titres fraîchement maquettés. En quelques mois, Broken Back fait le buzz sur la toile. Repéré par des blogs et des DJs influents (Klingande, Synapson), son improbable succès force bientôt Jérôme à un choix crucial. Poursuive son aventure musicale ? Ou retourner aux affaires à l’instant où se bousculent levées
de fonds et “business angels” ?
On connaît la suite : retour chez lui à Saint-Malo, semaines passées à sublimer les titres “Mild Blood” ou “Young Souls”, et publication d’un premier EP autoproduit d’une franche beauté. Solaire et entêtant, mélancolique et obsédant, Dear Misfortune, Mother of Joy offre ses tableaux flamboyant portés par une voix comme il n’en existe peut-être qu’une par génération. Tendre, éraillée, fragile, mais bourrée du désir de dire le bonheur reconquis.
Depuis, passé les scènes partagées avec Synapson, Jain ou Milky Chance, l’enfant de Saint-Malo s’est astreint chez lui à l’écriture d’un premier album mixé par les Skydancers. Saillies folk et dynamique house, charme artisanal et efficacité 2.0, ce grand disque clair, composé en solitaire, se joue à nouveau des territoires et des genres, mêlant dans un même geste intime et global, homemade et excellence, sérénité et grand frisson.
C’est “Excuses”, réflexion sur l’amitié faite amour. “Halcyon Birds”, chef-d’œuvre pop contant une relation à qui s’offre une seconde chance. C’est le diptyque “Better Run” et “Got To Go” où se dit la trajectoire d’un homme aimable rêvant d’être un bad boy, et rejoignant les enfers afin d’y sceller un pacte avec le diable. “Lady Bitterness” fable moderne où l’amer- tume fascine, et se fait addiction, puis poison. Plus loin, le tube “Happiest Man on Earth”, les multiples interprétations qu’il suppose et la question franche qu’il pose : “qui est l’homme le plus heureux du monde ?” C’est encore “Seven Words”, fable légère où un Don Juan moderne tombe amoureux de sa maîtresse. “Young Souls” et ses regrets d’une insouciance propre à l’enfance. Enfin “Modern Tale” où l’infidélité entre homme et femme est soumise à la question.
De l’espace, du soleil, l’immensité des panoramas et le juste regard porté sur le quotidien ou l’éphémère : le legs offert par Broken Back à son époque. Le présent est à la déprime et à la crainte d’autres jours sombres ? L’artiste panse les plaies ou rassure et, guitare en main, un beat soyeux portant ses récits, dit l’espoir et la joie, révélant du ciel là où auparavant ne dominait que du gris
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